Présidentielle 2017

 

 

Pourquoi François Fillon a-t-il été privé de second tour?

Les enseignements de l'écart entre prévision du modèle ElectionScope et intentions de votes des sondages

Bruno Jérôme, Véronique Jérôme.

2 Mai 2017

La campagne de 2017 n’a pas vraiment pu se faire sur le bilan des sortants puisque François Hollande a décidé de ne pas se représenter. Une courbe du chômage s’inversant en vertu d’un mauvais « timing », une popularité en berne et de mauvaises intentions de vote expliquent pour partie cette décision.

La campagne de 2017 n’a pas d’avantage pu se faire en vertu des programmes et notamment à partir du déclenchement du « pénélopegate » fin janvier. Privés de la possibilité de faire le bilan du « vrai sortant » et privés d’un débat sur les programmes, les électeurs se sont retrouvés dans le brouillard. Il ne leur restait plus qu’à utiliser les sondages d’intentions de vote comme boussole. Les sondages devenant le principal élément d’information, l’émotionnel et le subjectif ont supplanté le rationnel.

Dès lors, très proches jusque fin décembre 2016, les trajectoires respectives du modèle ElectionScope et des sondages (compilés) s’écartent définitivement à la fin du mois de janvier 2017. La présidentielle « imperdable » pour la droite et François Fillon a cessé de l’être (figures 1 à 3).

Bien qu’ayant pu intégrer l’hypothèse de responsabilité « diluée » des sortants (François Hollande ne se représentant pas), le modèle économétrique ElectionScope n’a pas pu, par essence, intégrer, en les anticipant, les différents chocs exogènes qui se sont produits à partir de fin janvier 2017 (figure 1). Néanmoins l’analyse de l’écart entre prévision du modèle et sondages d’intentions de vote constitue une information riche sur les ressorts de cette élection inédite.

Les éléments détaillés des raisons ayant conduit à la contre-performance du modèle ElectionScope (voir tableaux 1a, 1b, 2a et 2b) pour la présidentielle 2017 sont fournis dans notre interview consultable sur le site Atlantico.

https://fr.news.yahoo.com/electionscope-retour-mod%C3%A8le-pr%C3%A9diction-%C3%A9conom%C3%A9trique-%C3%A9chou%C3%A9-r%C3%A9sultats-1er-055728248.html

 

 

Prévision ElectionScope (Nowcasting d'avril 2017)

Macron ou la tragédie du favori des sondages?

 Vers un duel Le Pen-Fillon 

Bruno Jérôme, Véronique Jérôme.

18 avril 2017

Si l’on en croit la moyenne des sondages, Emmanuel Macron a de fortes chances de figurer au second tour de la présidentielle 2017.

Cependant, ne pourrait-il pas être victime de la « tragédie du favori des sondages » comme le furent Edouard Balladur ou Lionel Jospin en leur temps ?

Plusieurs facteurs pourraient conduire malgré tout à un duel Le Pen-Fillon au second tour de la présidentielle 2017.

Un désir d’alternance peut-être atténué mais bien réel :

Notre prévision en nowcasting a intégré depuis le mois de janvier l’hypothèse de responsabilité des sortants « diluée » par le fait que François Hollande ne s’est pas représenté craignant de perdre à tout coup. Ainsi, dans cette hypothèse, le bloc de droite passe d’une estimation théorique de 36,8% (responsabilité pleine de la gauche) à 27,8% (responsabilité diluée) en avril. Ce chiffre reste toutefois supérieur de 4 points à la moyenne des sondages.

Le bilan quand même :

Même en cas de responsabilité « diluée », une partie des électeurs ne peut oublier que Benoît Hamon et Emmanuel Macron ont gouverné sous la houlette de François Hollande et donc qu’ils sont comptables du bilan.

Le rapport de force droite/gauche sous-estimé par les sondages ?

Si l’on en croit la moyenne des sondages, le rapport de force droite (lato sensu) - gauche penche aujourd’hui à 53,4% en faveur de la gauche contre 38,8% en décembre 2016.

Il est à noter que de juillet 2014 à janvier 2016 sondages et nowcasting suivaient sensiblement la même tendance (voir figure 5).

Désormais, en avril 2017, le Nowcasting donne 6,6 points de plus au bloc de droite que les sondages (53,2% contre 46,6%). Si le bloc de gauche devait réunir le score de 53,4% promis par les sondages, ce serait la meilleure performance jamais obtenue par cette famille politique sous la Vème République. Même en 1988, sous François Mitterrand, la gauche n’est pas parvenue à dépasser la barre symbolique des 50% au premier tour.

Il apparait donc légitime de penser que le bloc de droite est sous-estimé par les sondages.

Le fantôme de 2002

Ceci n’est pas sans rappeler 2002, date à laquelle la droite totale avait été estimée à 48% au premier tour. Au final, elle a fait 57,5% propulsant en même temps Jacques Chirac et Jean-Marie le Pen au second tour.

Ainsi, un duel Marine Le Pen-François Filon tel que suggéré par le modèle ElectionScope reste une hypothèse réaliste reposant (n’oublions pas) sur des fondamentaux restant probabilistes.

 

C'est l’électeur qui fera le procès des sortants (*)

 

(*) Formule de Mark Peffley (1985) in The voter as juror

 

 

Bruno Jérôme, Véronique Jérôme.

27 mars 2017

 

 

Le modèle ElectionScope repose sur l’analyse du comportement de l’électeur qui vote dans une logique d’attribution de responsabilité aux sortants qu’il tient pour comptables de leur bilan. Comme l’a démontré Valdimer Oliver Key (1966), si le bilan est jugé bon, l’électeur est incité à récompenser le politique en le reconduisant aux affaires. Dans le cas contraire il choisira l’opposition.

 

2017 : les quatre facteurs d’une « dilution » de la responsabilité gouvernementale

 

Le modèle est-il toujours valide pour prévoir la présidentielle de 2017 ? Oui à condition de tenir compte du caractère inédit de la situation depuis janvier dernier. A savoir :

 

- le sortant a « refusé l’obstacle », plombé par une impopularité record sous la Vème République. François Hollande aurait-il ainsi douté de son bilan au point de renoncer à convaincre les français de le réélire ?

- la primaire de la gauche à désigné un frondeur qui a plus souvent critiqué l’action du sortant pendant son passage au gouvernement et après. Comment peut-on dès lors demander à Benoit Hamon de défendre le bilan de François Hollande ?

- Emmanuel Macron peut-il être désigné comme second sortant sur le papier ? Oui et non, du fait de son positionnement « à droite et à gauche » voire « ni-niste ».[1]

Il tente ainsi de se soustraire de lui-même au fardeau du bilan. Les « mauvaises langues » diront qu’il a cependant participé de près ou de loin aux choix gouvernementaux de mai 2012 à septembre 2016. Il tente aussi de s’extraire du modèle partisan de la Vème République reposant sur l’alternance droite-gauche, comme si les marqueurs de droite et de gauche ne faisaient plus sens.

- dernier fait assez inédit et inattendu, ce que la finance appelle un cygne noir (voir Nassib Nicholas Taleb et la théorie du black swan), nous devrions plutôt parler ici de « canard noir », tant la sortie de l’article de presse du 25 janvier du Canard Enchaîné visant François Fillon semble avoir marqué un coup d’arrêt à l’élan qui devait conduire – aux dires des observateurs (sondages et modèle ElectionScope compris) - le candidat de la droite à l’Elysée en réponse à une demande d’alternance. Dès lors, le socle électoral de la droite et du centre-droit s’en verrait entamé au profit de la gauche, celui du FN restant de son côté relativement incompressible.

 

Ceci nous conduit à émettre l’hypothèse que la responsabilité de la gauche sortante pourrait être considérablement « diluée » (par opposition à la responsabilité « pleine ») altérant ainsi le réflexe « punition-récompense » des électeurs.

 

Comment adapter le modèle de prévision ElectionScope à la nouvelle donne ?

 

Notre modèle de vote politico-économique permet de tester l’hypothèse de responsabilité « diluée » à celle de responsabilité « pleine » puis d’en mesurer l’impact sous forme de prévisions au fil-de-l ’eau (nowcasting).

 

L’algorithme du vote pour les sortants repose sur l’évolution du chômage, les élections passées, la crédibilité de l’exécutif, les zones de force partisanes dans les territoires[2] et sur la caractéristique « idéologie » du Président sortant. Or, la neutralisation de ce dernier paramètre dans le calcul de la prévision permet de simuler l’effet d’une responsabilité qui aurait été effectivement « diluée » par les quatre évènements susmentionnés.

 

 

Prévision du rapport de force droite-gauche : modèle et sondages comparés

 

Ainsi, selon le modèle ElectionScope, si les élections avaient lieu quatre semaines avant le 1er tour, sous cette dernière hypothèse, la gauche totale[3] atteindrait 47% des voix contre 27,9% pour la droite « classique »[4] et 24,8% pour le FN. En cas de responsabilité « pleine » imputée aux sortants, la gauche recueillerait 38% des voix contre 37% à la droite.

 

Par comparaison, la moyenne des sondages du mois de mars (calcul des auteurs sur 8 instituts) accorde 52% à la gauche contre 22,4% à la droite et 25,2% au FN. On notera que jusqu’en décembre 2016 (hypothèse de responsabilité « pleine »), modèle et sondages convergeaient remarquablement.  

 

En dépit du renforcement du socle électoral de la gauche en cas de responsabilité « diluée », la droite et son candidat principal, François Fillon, sont-ils pour autant irrémédiablement éliminés au premier tour comme les sondages semblent l’annoncer ? En réalité, pas nécessairement.

 

Résultats du nowcasting de mars 2017 par candidats : Fillon et Macron à égalité au premier tour

 

En retenant les socles électoraux prévus pour la droite (27,9%) et la gauche (47%) et en les combinant aux scores moyens obtenus par les différents candidats dans les sondages[5], notre prévision en nowcasting montre qu’Emmanuel Macron et François Fillon arriveraient à égalité au premier tour avec 23% des voix. Marine Le Pen étant en tête avec un score prévu de 24,8% des voix. Rien n’est donc joué, et ce d’autant plus que l’hypothèse de responsabilité « diluée » demeure une hypothèse « haute » pour la gauche.

 

Tout mouvement d’une partie des électeurs vers un comportement classique de sanction des sortants, ou bien de vote partisan (retour de la polarisation droite/gauche), ramènerait la gauche entre 47% et 38% des voix, ce qui ramènerait à l’hypothèse d’un duel Fillon-Le Pen comme cela semblait se dessiner, quelles que soient les méthodes, jusqu’au 25 janvier 2017.

 

Dans la tête des électeurs : la sanction du bilan plus forte que les « affaires »

 

Pour l’heure, l’écart notable entre les sondages et le modèle ElectionScope semble indiquer que les électeurs sont avant tout animés par un sentiment de sanction des « affaires », mais il ne faudrait pas négliger pour autant la résistance du réflexe de sanction des « responsables » de la politique économique passée. D’une part, les enjeux économiques et régaliens n’ont pas pu disparaître du jour au lendemain dans l’esprit des citoyens-électeurs.  Enfin, le ralliement progressif de plusieurs ministres de François Hollande à Emmanuel Macron, et peut-être (qui sait) celui de Manuel Valls en personne, neutraliseront progressivement la dilution de la responsabilité gouvernementale dont le leader d’En marche a bénéficié jusqu’à présent.

 

 

[1] Positionnement stratégique adopté par François Mitterrand contre Jacques Chirac et Raymond Barre en 1988.

 

{2] Le modèle ElectionScope permet de simuler des résultats pour les départements et les grandes régions. Voir annexe ci-dessous dans le cas d’une responsabilité « diluée » du gouvernement.

[3] Extrême gauche + Mélenchon + Hamon + Macron + Lassalle (ex-Modem).

[4] Fillon + Dupont-Aignan + Asselineau

[5] Ces socles sont pris pour référence pour évaluer les potentiels électoraux internes à chaque camp. Le score du FN reste de son côté celui prévu directement par le modèle.

 

Annexe : prévisions par grandes régions

(hypothèse de responsabilité "diluée")

Indice de Prévision Composite ElectionScope

 

Duel Le Pen - Fillon au second tour

 

Bruno Jérôme, Véronique Jérôme.

18 février 2017

L’Indice de Prévision Composite ElectionScope combine, en leur attribuant les mêmes poids, la compilation des enquêtes d’intention de vote et le nowcasting issu de notre modèle politico-économique (voir article du 12 février 2017).

Les prévisions par candidats s’appuient en outre sur les rapports de force internes à chaque « bloc » politique tels qu’ils sont révélés par les intentions de vote (prises en moyenne).

Qualification au second tour de la présidentielle: pourquoi rien n’est joué ?

Les enseignements de la divergence entre modèles et sondages

Bruno Jérôme, Véronique Jérôme

le 12 février 2017

 

Prévisions du nowcasting versus intentions de vote

Notre dernière prévision de la présidentielle 2017 effectuée en nowcasting donne 38,7% des voix au bloc de gauche contre 37,8% au bloc de la droite et du centre et 23,8% au Front National.

Si l’on prend en compte les rapports de force internes à chaque bloc, avec un potentiel électoral de 29,5%, François Fillon devancerait Marine le Pen (23,8%), Emmanuel Macron (16,1%), Benoît Hamon (11,7%) et Jean-Luc Mélenchon (8,7%).

Les prévisions en nowcasting produites « au fil de l’eau » (tous les trimestres puis mois par mois) contrastent singulièrement avec les projections agrégées sur huit instituts de sondages.

En février, ces derniers font apparaitre un score agrégé de 50,7% pour le bloc de gauche contre 24,3% pour la droite et le centre et 24,9% pour le Front National. Dans le détail et en moyenne, forte du score précédant, Marine le Pen devance Emmanuel Macron (21,3%) et François Fillon (18,9%). De son côté, Benoît Hamon totaliserait 15,4% des voix devant Jean-Luc Mélenchon (11,5%).

A noter que les prévisions en nowcasting restent proches des sondages agrégés s’agissant de Marine Le Pen.

Néanmoins, comment expliquer certains écarts spectaculaires d’une méthode à l’autre en ce début février ? Et qu’en déduire sur les projections du duel de second tour ?

 

Comment expliquer les écarts entre les deux méthodes ?

 Les prévisions des modèles reposent sur des déterminants essentiellement objectifs et rationnels (variation du chômage, élections passées, zones de force régionales) et quelques facteurs subjectifs (crédibilité de l’exécutif, popularité des leaders politiques). Ces prévisions ne peuvent d’ailleurs pas être interprétées en dehors des hypothèses qui les fondent. Elles reposent en outre sur une marge d’erreur. Il s’agit par conséquent d’une démarche probabiliste. Ainsi, si les électeurs votent en moyenne selon les mêmes critères que dans le passé, la prévision devrait approcher, en l’anticipant, le score réel.

Les intentions de votes des sondages peuvent être sujettes à certains biais d’actualité où l’émotion éprouvée par les interviewés peut jouer un rôle important dans la construction des rapports de forces potentiels en un point du temps. A ce titre, les affaires révélées dans les médias et répercutés par les réseaux sociaux, les petites phrases, les images choc relatives aux problèmes de sécurité intérieure (comme extérieure), peuvent influer sur les réponses et traduire in fine plus un jugement de valeur qu’une intention de vote. Un biais de négativité apparait alors au détriment de certains candidats victimes du phénomène d’asymétrie du blâme[1]. On ne peut écarter non plus l’apparition d’un effet « concours de beauté » ou certaines personnes interviewées répondraient en conformité avec ce qu’ils pensent être l’opinion dominante du moment. Enfin une certaine « spirale du silence » n’est pas à écarter. Dans ce cas la non révélation de ses vraies préférences et intentions par crainte d’avouer soutenir un candidat chahuté alimente un vote caché.

Ces différences de fond expliquent en partie pourquoi les deux méthodes divergent radicalement en ce début de mois de février au point de ne plus converger quant au probable duel de second tour.

La persistance des déterminants « lourds » du vote face aux « affaires »

Jusqu’en janvier 2017, nowcasting et sondages entrevoyaient un duel Le Pen-Fillon au second tour. Début février, les sondages penchent pour un duel Macron-Le Pen.

Même s’il est hasardeux de penser que le « Fillongate » n’aura aucune répercussion sur le vote des électeurs en avril prochain, on ne doit pas oublier que le vote repose aussi sur des facteurs rationnels jouant un rôle décisif parmi lesquels, les programmes des candidats, mais surtout, la perception de la situation économique (globale et personnelle) et le bilan des sortants.

Que change la comparaison des programmes des candidats ?

Ainsi, en se rapprochant de l’échéance du 17 mars (date de dépôt des candidatures), l’impact des affaires devrait passer derrière le débat sur les programmes auprès des électeurs de droite et du centre qui attendent l’alternance.

A ce titre, les programmes des principaux candidats sont connus à l’exception de celui d’Emmanuel Macron qui tarde à le dévoiler par soucis tactique. Son positionnement « ni à droite ni à gauche » lui permet de progresser dans les intentions de vote avec une absence de programme qui « vaut programme ».  Il joue en réalité sur une double « triangulation »[2] qui, dans les sondages, affaiblit pour l’heure Benoît Hamon à gauche et François Fillon à droite.

Mais une fois son programme dévoilé, Emmanuel Macron ne pourra pas échapper au phénomène de polarisation. Un programme biaisé à droite chassera une partie de ses soutiens socialistes vers Benoît Hamon tandis qu’un programme biaisé à gauche renforcera François Fillon. Quant à oser le « double biais », la déperdition n’en serait que plus forte des deux côtés du spectre politique.

N’oublions pas le fardeau du bilan

François Hollande ayant fait le choix de ne pas l’assumer et Manuel Valls étant sorti du jeu, quel est le poids réel du bilan dans le jugement des électeurs ?

Benoît Hamon, ministre de mai 2012 à août 2014, a été élu pour son profil de frondeur lors de la primaire mais Investi par le camp des sortants. Il ne pourra donc pas échapper au bilan.

Emmanuel Macron, secrétaire adjoint de la présidence puis ministre de l’économie de mai 2012 à août 2016, tente lui aussi d’échapper au bilan jusqu’à aller au « déni de bilan ». Mais dévoilant son programme après tous les autres candidats, il redeviendra pour ses adversaires, sur sa gauche comme sur sa droite, un représentant de l’équipe sortante, lui aussi.

Diversifier les outils de prévision

Dans la mesure où les évènements politico-juridiques du début février risquent d’affaiblir un peu le poids des déterminants rationnels du vote, nous avons choisi d’agréger les prévisions du nowcasting et la compilation intentions de vote, pratique notamment utilisée par Pollyvote.


[1] L’intensité de la sanction est toujours supérieure à celle de la récompense.

[2] La triangulation est une tactique consistant à s’approprier certaines des idées de ses adversaires pour mieux les déstabiliser.

 

Le duel Fillon-le Pen toujours envisageable

Il en ressort que le bloc de gauche représenterait 44,5% des voix contre 31,1% au bloc « droite et centre ». Le FN obtiendrait de son côté 24,35% des voix. Et par candidat, Marine le Pen devancerait François Fillon (24,2%) et Emmanuel Macron (18,68%).

Les déterminants « lourds » du vote l’emportant sur les comportements émotionnels révélés dans les intentions de vote, l’hypothèse d’un duel Fillon-Le Pen reste toujours envisageable.

 

 

Courbe des demandeurs d’emplois et cycle électoral : François Hollande est entré dans la période « critique »

 

Bruno Jérôme

Véronique Jérôme

 

Jeudi 29 septembre 2016

A sept mois du premier tour de l’élection présidentielle, François Hollande est entré dans la période « critique ». La courbe des demandeurs d’emploi n’a en effet pas encore atteint le point de retournement décisif, contrairement à certains de ses prédécesseurs en position de sortant.

 

Parmi les sortants qui ont vu la reconduction de leur camp, Jacques Chirac en 2007 et Edouard Balladur[1] en 1995 ont bénéficié d’un retournement de la courbe des demandeurs d’emploi au moins un an avant la présidentielle.

 

Paradoxalement, on notera le « couac » de 1986-1988, période à laquelle Jacques Chirac PM « cohabitant » échoue à la présidentielle alors que la courbe des demandeurs d’emploi s’est inversée quatre trimestres avant l’échéance.

 

De son côté, Lionel Jospin, lui aussi « cohabitant »,  a connu 19 trimestres de baisse du nombre de demandeurs d’emploi avant le retournement à la hausse fatidique du 3ème trimestre 2001.

 

Enfin, si l’on ne s’en tient qu’à cet indicateur du nombre de chômeurs, le sort de Valéry Giscard d’Estaing était scellé 13 trimestres avant l’échéance. Celui de Nicolas Sarkozy est resté incertain jusqu’à l’accélération du nombre de demandeurs d’emploi au second trimestre 2011.

 

[1] En tant que PM, certes malheureux à titre personnel.

Prévision politico-économique de la Présidentielle 2017 (vague 1)

 

Embellie sur le front du chômage : un mauvais scenario pour le FN ? 

 

 

Bruno Jérôme

Véronique Jérôme

 

 30 Avril 2016

Crédits : le jdd.fr

Analyse 

 

A voir aussi "Une reprise qui fait reculer le FN"

Le Journal du Dimanche 30 avril-1er mai, page 5.

 

 

Le rapport de force par grands blocs, droite et centre /gauche/FN

 

Au mois d’avril, la droite et le centre devancent de peu la gauche avec 38% de potentiel électoral contre 37,7 pour la gauche. Depuis mai 2012, la gauche n’a dominé la droite dans notre simulation qu’au premier trimestre 2016 à la faveur de « l’effet retard » du regain de popularité obtenu par François Hollande, en janvier 2016, suite aux attentats de décembre 2015.

Aujourd’hui cet effet est totalement gommé, et la gauche est au contraire pénalisée par la rechute de la popularité du chef de l’Etat. Cependant la stabilisation du taux de chômage autour de 10% depuis un an (plus sous l’effet des emplois aidés que d’une croissance insuffisante pour créer de l’emploi net) permet d’amortir l’effet précédent.

 

La baisse du chômage, cette ennemie du FN

 

On notera aussi que la stabilisation du taux de chômage entame progressivement le potentiel électoral du FN, ce qui permet un retour au bercail de certains électeurs « perdus » dans les bastions de gauche. Notre simulation donnait 28,8% des voix au FN en septembre 2013. Fin avril 2016, ce score simulé est de 24,3%. A noter que l’érosion de la popularité de Marine le Pen continue à accentuer cette tendance.

 

Rapport de force par partis politiques

 

Si l’on simule les voix par partis à partir des rapports de force par blocs du modèle, on constate que le candidat socialiste, avec 17,3% des voix, a pour l’heure peu de chance de se qualifier pour le second tour quel qu’il fût. La concurrence du Front de Gauche, de l’extrême gauche et d’EELV lui est fatale. Les trois formations concurrentes à la gauche du PS « gêlent» 20,4% des voix.

A droite et au centre, le potentiel de voix est de 32,4% des voix en dépit de la concurrence de Debout la France. C’est le score potentiel qu’Alain Juppé ou tout autre candidat vainqueur de la primaire à droite peut (potentiellement) atteindre à condition que François Bayrou ne se présente pas. Dans cette hypothèse, François Bayrou recueillerait autour de 12% des voix ce qui ramènerait le candidat LR à 20,4%.

 

Conjoncture économique aidant, en cas de candidature de Nicolas Sarkozy, François Hollande se rapproche de la qualification, mais…

 

Or, la victoire de Nicolas Sarkozy à la primaire de la droite rendrait la candidature de François Bayrou quasi automatique. On comprend dès lors pourquoi François Hollande compte tant sur l’amélioration probable de la conjoncture économique d’ici à avril 2017, ce qui améliorerait mécaniquement le score de la gauche, en même temps que sa popularité, même s’il aura du mal à atteindre le seuil minimum (empirique) de 42% de satisfaits nécessaire (mais pas suffisant) pour l’emporter sous la Vème République.

A noter que dans l’hypothèse d’un second tour « classique » droite/gauche, notre simulation montre que le candidat de droite l’emporterait largement avec 54% des voix.

 

Mais pour l’heure, ce n’est pas le scenario le plus probable car c’est toujours la candidate du FN qui est qualifiée pour le second tour.

 

 

 

Méthodologie

 

Les prévisions électorales présentées ici sont issues d’un modèle « politico-économétrique » dont la particularité et de générer un potentiel électoral à partir d’un panel de données (spatio-temporelles) à la fois objectives et subjectives. Les données objectives sont d’ordre électoral (élections passées, bastions territoriaux, dates électorales « clés », reports moyens d’un tour à l’autre) et économique (variation du taux de chômage sur une année). Les données subjectives sont la crédibilité de l’exécutif (via la popularité du Président ou du Premier ministre en cohabitation) et l’écart de popularité préélectoral entre candidats.

Les simulations des scores du premier tour sont données à partir de trois équations, l’équation des « sortants », celle de l’opposition « hors  FN » et celle du FN.

L’équation du second tour donne une simulation du score droite/gauche dans l’hypothèse d’un duel classique.

On notera que le modèle génère d’abord des résultats par grandes régions, lesquels sont ensuite agrégés. A cet égard, nous proposons une simulation des rapports de force entre grands blocs au fil de l’eau depuis mai 2012, avec un rythme trimestriel puis mensuel depuis avril 2016. Enfin, nous donnons désormais une estimation par parti politique à l’intérieur de chaque grand bloc (Gauche, droite et centre, FN). Pour ce faire nous combinons les potentiels électoraux issus de nos estimations économétriques et les rapports de force internes à chaque famille politique révélés par les sondages préélectoraux (compilés par nos soins).

Cycle économique électoral du chômage :

A 14 mois de la présidentielle toujours pas d’inversion de la courbe du chômage

 

Bruno Jérôme

Véronique Jérôme

 

24 Mars 2016

Remanier sans se renier : la difficile entreprise de François Hollande

 

Ou comment faire un gouvernement de combat …sans combattants

 

Véronique Jérôme                             

Bruno Jérôme

 

10 février 2016

  • Remaniement technique ou …plus si affinité ?

Doit-on s’attendre à un remaniement technique dû aux départs de Sylvia Pinel (ministre du logement de l’égalité des territoires et de la ruralité) élue première vice-présidente de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées et, au départ de Laurent Fabius,  futur président du Conseil constitutionnel ou, aura-t-on plus si affinités ?

Car au-delà de la simple question un peu protocolaire, il y a la question de fond : un remaniement pour quoi faire ? Pourquoi maintenant ? Et que peut en attendre le principal  intéressé à savoir le chef de l’Etat en fin de mandat et déjà virtuellement en campagne pour 2017 ?

  • Remaniement pour une reconquête de l’opinion

Il est en effet impossible de ne pas voir dans cette opération un objectif stratégique de reconquête. Reconquête de l’opinion : une nécessité pour un Président qui de nouveau affiche une crédibilité peau de chagrin ; reconquête de la confiance en général, car elle est le ciment indispensable à l’action politique.

Que penser d’un remaniement à cet instant du calendrier, c’est-à-dire à moins d’un an et demi de la fin du mandat ? Peut-on en espérer un quelconque bénéfice ? Un effet booster sur les réformes ? Et surtout sur les résultats de ces réformes ? S’agissant des mesures sur le marché du travail, on sait néanmoins que des phénomènes d’hystérèse sont inévitables, tant les ajustements et les réactions  sont chronophages.

 

  • Mais sous la V° : rares sont les gains en popularité  issus des remaniements

De surcroît, il semble au regard de nos travaux (http://www.electionscope.fr ) qu’il y ait peu à attendre d’un remaniement, en termes de supplément de popularité présidentielle.

A l’exception de Charles de Gaulle qui a pris 6 points en 1968 (Ifop) en remplaçant Georges Pompidou par Maurice Couve de Murville, ou dans une moindre mesure les 3 points gagnés par Nicolas Sarkozy  pour le passage de Fillon 1 à Fillon 2 en novembre 2010 ; force est de constater que dans les autres cas les effets furent au mieux nuls mais le plus souvent négatifs (stabilité de la popularité de François Mitterrand sur mars-avril 1992, mais jusqu’à 6 points de perte pour Valéry Giscard d’Estaing sur juillet-septembre 1976). Enfin, lors du dernier remaniement, lorsque Manuel Valls  a remplacé Jean-Marc Ayrault à Matignon, la popularité de François Hollande est passée de 23% de satisfaits (Ifop JDD mars 2014) à 18% en avril, soit une baisse de 5 points. Notons qu’aujourd’hui le chef de l’Etat bénéficie d’une cote avant remaniement comparable à celle de 2014, il est à 24% de satisfaits (Ifop JDD).

  • Un remaniement rassembleur

Un remaniement rassembleur d’une majorité gouvernementale élargie pour les besoins du prochain rendez-vous électoral. L’idée consiste à profiter de cette occasion pour faire une sorte d’ouverture, mais une ouverture en interne. Le gouvernement réduit à une expression sociale-libérale depuis le départ de Christiane Taubira pourrait prendre le chemin d’un élargissement en intégrant des écologistes compatibles ? Mais pourrait-il aller plus loin ? Plus à gauche ? Pourra-t-il n’en retirer que des avantages sans les inconvénients ? Difficile à croire, et dans ce cas il conviendra de se limiter à une démarche dite de second best, un moindre mal en tentant de minimiser les pertes à défaut de pouvoir maximiser les gains.

Une recherche de la quadrature du cercle en quelque sorte, qui consisterait à faire une ouverture de façade en ouvrant grand la porte aux hommes et pas à leurs idées. Une équation sous tant de contraintes que la recherche d’un équilibre stable et durable semble bien illusoire.

 

  • Au final on risque d’avoir un remaniement pour …FAIRE sans DEFAIRE

Faire un gouvernement dit « de combat »  … sans combattants, sans  profils trop clivants, sans ministres  trop revendicatifs qui réclameraient une modification du cap de la politique économique.

 

Le problème est, que c’est justement, de ces « combattants » que François Hollande pourrait – s’il est candidat- avoir besoin dès le premier tour de 2017 …