Municipales des 23 et 30 mars 2014
Prévision et probabilités de victoire sur 236 villes du panel ElectionScope®
Au soir du 30 mars prochain, la droite pourrait avoir pris à la gauche entre 19 et 39 villes de plus de 30 000 habitants. Telles sont les conclusions de notre dernière vague de simulation ElectionScope sur les potentiels électoraux des équipes sortantes.
Notre dernière étude prend en compte la réactualisation de l’indice de popularité de François Hollande (décembre 2013 est la référence retenue) , les derniers taux de chômage par zone d’emploi connus (septembre 2013), le nombre de candidats du FN effectivement présents au premier tour, le nombre de dissidents de droite comme de gauche et enfin, le nombre de primaires officielles ou « officialisées » par les états-majors.
Les autres variables explicatives du vote telles que, les scores électoraux passés, la socio-démographie urbaine, la qualité de gestion, les caractéristiques d’âge de la population et les caractéristiques du patrimoine bâti sont restées inchangées par rapport à la dernière étude.
Ainsi, au sein de notre panel de 236 villes de plus de 30000 habitants, nous avons dénombré les éléments suivants :
Le Front National est présent au premier tour dans 157 villes sur les 236 villes de notre panel, soit les deux tiers. Précisément, le FN est présent dans 89 villes de gauche et dans 68 villes de droite.
Il y aura trois fois plus de dissidents dans les villes de gauche que dans les villes de droite. On dénombre 94 cas de dissidences (EELV, DVG ou FG) face aux listes d’union de la gauche contre 36 cas de dissidences à droite, face aux listes d’union.
On compte par ailleurs 16 cas de primaires (8 à droite et 8 à gauche).
Nous avons dans un premier temps simulé le vote au premier tour, à partir des facteurs susmentionnés, par grands blocs (droite/gauche) dans les 236 villes du panel. Parallèlement nous avons estimé le score du Front National dans chaque ville à partir d’un petit modèle tenant compte de la corrélation entre les scores estimés par les instituts de sondages dans 43 villes et le score obtenu par Marine le Pen en 2012. Nous avons à partir de là établi si le FN pourrait se maintenir ou pas au second tour. Après avoir appliqué un coefficient d’érosion entre les deux tours, nous avons enfin estimé le score du FN au second tour.
Nous avons ensuite simulé le score des équipes sortantes au second tour, mais en vertu de deux hypothèses :
Hypothèse 1 : le report des dissidents et des perdants des primaires est parfait sur les candidats restant en lice.
Hypothèse 2 : les dissidents et des perdants des primaires ne se reportent imparfaitement sur les candidats restant en lice. On applique alors les décotes prévues par le modèle.
Voir tableaux de synthèse des résultats sur notre blog (site web
francetvinfo)
Interprétation des résultats:
Il s’agit de simulations scientifiques et donc probabilistes. Ces dernières ne sont pas interprétables en dehors des hypothèses du modèle. Certaines d’entre elles seront conformes aux résultats des 23 et 30 mars tandis que d’autres non. Si tel est le cas, certains paramètres non compris dans le modèle auront sans doute joué. Les prévisions actuelles envisagent le maintien du FN dans certaines villes.
La modélisation du vote pour les élections municipales de mars 2014
La prévision des élections municipales de 2014 (principes et interprétation)
Le calcul des probabilités de victoire
Les projections et probabilités de victoire pour 2014
La modélisation politico-économique des élections municipales
La base de données ElectionScope des municipales, un bref historique
La base de données ElectionScope des municipales, un bref historique
Le modèle des municipales, exploite une base de données originale couvrant 236 villes de plus de 30000 habitants sur cinq mandats municipaux (1983-2008). Elle est aujourd’hui constituée de 165[1] variables politiques, démographiques, socio-économiques et financières, à raison de 1180 observations par variable.
L’embryon initial de notre base a été constitué en 1994 à l’occasion d’une étude sur les retombées électorales de la concurrence fiscale entre communes (Deffains, Jérôme et Speziari, 1996). Elle a été ensuite largement augmentée et mise à jour lors de l’élaboration de la fonction de vote politico-économique des élections municipales de 2001 (Jérôme-Speziari et Jérôme, 2002).
Enfin, à l’occasion de la modélisation des élections municipales de 2008, la base a été agrémentée de variables financières supplémentaires afin de construire un indicateur synthétique de qualité de la gestion municipale (Jérôme, Jérôme-Speziari, 2008).
Aujourd’hui à l’horizon des élections municipales de 2014, à l’issue de travaux menés conjointement avec Richard Nadeau de l’Université de Montréal, nous avons enrichi la base de données et le modèle de vote d’un module additionnel consacré aux déterminants démographiques et socio-économiques locaux. Nous avons notamment inclus un indicateur synthétique de socio-démographie professionnelle des villes.
Notre panel de 236 villes de plus de 30 000 habitants est-il représentatif des grandes tendances politiques observées aux municipales depuis 1983 en France?
En ce qui concerne la question du dénombrement et de la répartition géographique, sur l’ensemble des 236 villes du panel, les communes d’Ile de France ont un poids de 32,62% (77 villes), Rhône Alpes, 8,9% (21 villes), Provence Alpes Côte d’Azur, 8,9% (21 villes) et Nord Pas de Calais, 6,7% (16 villes).
Notre panel couvre en tout 30% de la population française (métropole).
Si l’on prend le poids budgétaire comme critère de référence, les finances publiques locales, des 236 villes du panel recouvrent 44% des dépenses totales des communes seules, soit 39,7 milliards d’euros[2], [3] soit encore 2% du PIB de la France.
En ce qui concerne l’évolution du rapport de force politique entre grands blocs politiques depuis les débuts de la V° République, le panel représente fidèlement la chronique des municipales françaises sur la période 1965-2008.
Il rend compte de faits stylisés majeurs comme la suprématie de la gauche en villes (exception faite (de 2001) depuis 1977 sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing. Du côté de la droite, le panel rend compte du regain obtenu par la droite en 1983 deux ans après l’élection de François Mitterrand. Ce mouvement sera interrompu en 1989 à la suite de la réélection de François Mitterrand, et s’achèvera après la « vague » bleue de 2001 pendant la cohabitation entre Jacques Chirac et Lionel Jospin. En 1977, la gauche administrait 161 villes sur les 236 de notre panel. En 2001, elle redevient minoritaire avec 110 villes. A l’issue des élections de 2008, elle administre 140 villes.
Qu’en est-il du rapport de force interne à la gauche ?
Sur longue période, la gauche non communiste et le « socialisme municipal » font plus que compenser le déclin progressif du Parti communiste. A l’issue des élections de 1977, dans notre panel, le PC administrait 75 villes, puis 52 en 1983, 46 en 1989, 40 en 1995, 30 en 2001 et 32 en 2008.
On notera qu’en 1995 le PC était revenu à son niveau de villes administrées de 1959. Le déclin du communisme municipal sur le long terme entre donc en phase active en 2001, le seuil de 40 villes étant enfoncé. La question est aujourd’hui de savoir si ce processus sera endigué ou non en 2014 à la faveur des difficultés rencontrées par le parti socialiste au pouvoir.
[1] 114 variables sont exploitées dans la modélisation en vue de 2014.
[2]Sur un total de 94 milliards d’euros de dépenses en 2011 (comptes administratifs des communes, ministère de l’intérieur). Les dépenses totales des collectivités locales représentent 219 milliards d’euros, soit 12% du PIB français.
[3]Calculs des auteurs.
Organisation de la base et variables
La base de données générale est composée de 5 blocs de variables (A à B):
- (A) Le bloc « environnement politique» ainsi subdivisé :
- (B) Le bloc « environnement économique » (taux de chômage par zone d’emploi)
- (C) Le bloc « finances publiques locales »
- (D) Le bloc « socio-démographie » (catégories socioprofessionnelles, population)
- (E) Le bloc « caractéristiques urbaines » (propriétaires, locataires, nombre de logements, type d’habitat).
A- Le bloc « environnement politique »
A1- variables électorales
Sources : Le Monde ; Le Figaro ; Ministère de l’intérieur ; calculs et construction de variables par les soins des auteurs.
A2- variables d’implantation électorale
Sources : Le Monde ; Le Figaro ; Ministère de l’intérieur ; calculs et construction de variables par les soins des auteurs.
A3- variables de caractéristiques politiques locales
A4 - variables de crédibilité de l’exécutif à l’échelon national
Sources : IFOP ; calculs et construction de variables par les soins des auteurs.
Crédibilité de l’exécutif de l’échelon central :
B - Le bloc « environnement économique »
Sources : Insee et Ministère du travail
La variable essentielle de ce bloc est le taux de chômage par zone d’emploi. La municipalité n’a certes pas pour compétence principale la politique de l’emploi, mais ceci ne signifie pas qu’elle reste inactive en la matière. Les municipalités tentent généralement de mobiliser les énergies et d’attirer le plus grand nombre possible d’entreprises de la matière imposable, tout en favorisant et en contribuant au développement de l’investissement et, corrélativement, de l’emploi. Ajoutons qu’un maire de grande ville proche du gouvernement devient un relais privilégié de la politique macroéconomique.
Pour cette raison, les électeurs ne peuvent être insensibles aux évolutions du taux de chômage local lorsque les sortants sont de la même couleur politique que le pouvoir central. A noter que nous n’avons pas retenu le taux de chômage intra muros. D’une part, les agents sont mobiles et ne travaillent pas dans leur grande majorité dans leur propre ville. Par ailleurs, nous avons voulu saisir l’évolution de la santé de de l’environnement économique dans lequel se situe la ville, ce qui dépasse ses contours géographiques et juridictionnels.
C - Le bloc « finances publiques locales »
Sources : Direction générale des collectivités locales du Ministère de l’intérieur ; Ministère de l’économie et des finances ; calculs et construction de variables par les soins des auteurs, indicateurs ElectionScope.
Les variables de ce bloc reflètent la performance financière des communes. La plupart d’entre elles sont mobilisées dans la construction de l’indicateur de qualité de la gestion municipale (QGMUN). Certaines variables approchent également la « richesse » des villes à travers la matière fiscale qu’elles représentent ainsi que leur attractivité potentielle.
Méthodologie et construction de QGMUN
A partir de douze indicateurs et ratios des finances publiques locales (source Comptes administratifs des communes) nous avons établi un classement des 236 villes de plus de 30 000 habitants. L’objectif est de suivre sur cinq mandats municipaux (1983, 1989, 1995, 2001 et 2008) la dynamique de la qualité » de la gestion locale dont on peut supposer qu’elle est reliée positivement au niveau de bien-être des agents économiques. Les auteurs ont recalculé les ratios pour les années préélectorales 1982 et 1988 afin de les rendre compatibles et comparables avec la période récente.
Pour chacun des indicateurs on établit un classement de 1 à 236.
On calcule ensuite le classement moyen pour les 12 indicateurs pour aboutir au classement général.
Les 12 indicateurs sélectionnés sont :
Financement de la charge de la dette (dépenses de fonctionnement + remboursement de la dette sur recettes réelles de fonctionnement) (-)
Niveau des dépenses (dépenses structurelles) dépenses de fonctionnement par tête (-)
Rigidité des dépenses (frais de personnel + intérêts de la dette sur dépenses réelles de fonctionnement) (-)
Fiscalité directe locale (produit des 4 taxes par tête) (-)
Mobilisation potentiel fiscal (Produit des 4 taxes sur potentiel fiscal) (-)
Dépenses d'équipement brut /hab (+)
Encours de la dette/hab (-)
Dépenses d’équipement brut sur recettes réelles de fonctionnement (+)
Taux Foncier Bâti (-)
Taux Foncier non Bâti (-)
Taxe d’Habitation (-)
(+) : Indicateur relié positivement au niveau de bien être. Le niveau de l’indicateur doit être le plus élevé possible.
(-) : Indicateur relié négativement au niveau de bien être. Le niveau de l’indicateur doit être le moins élevé possible.
Exemple[1] :
Le graphique ci-dessous présente une application pour trois grades villes d’Ile de France depuis 1982. On notera que la ville de Saint-Maur des fossés fait toujours partie des villes les plus endettées en 2013.
Sur le graphique, on observe que depuis 1982, la santé financière de St Maur se dégrade tandis que celle d’Issy s’améliore. En revanche la santé financière de Versailles est cyclique. Ces observations faites, il est ensuite possible de retourner dans les classements par ratio pour déterminer lesquels sont responsables de l’évolution globale de la santé financière d’une ville. On peut alors passer au décryptage en revenant à l’analyse détaillée des ratios.
D- Le bloc « socio-démographie » (catégories socioprofessionnelles, population)
Sources : Insee ; calculs et construction de variables par les soins des auteurs
Ces variables mesurent les dominantes socio-démographiques des populations des villes ainsi que l’évolution apparente de leur attractivité (phénomène de vote avec les pieds).
E - Le bloc « caractéristiques urbaines »
Sources : Insee ; calculs et construction de variables par les soins des auteurs
Ce bloc regroupe les caractéristiques urbaines des villes du point de vue du statut des habitants (propriétaires, locataires), du nombre et du type d’habitat.
Les données sont observées dans le temps et sur la durée des mandatures. L’objectif est ici de saisir l’évolution apparente ainsi que la modification des caractéristiques urbaines des communes de plus de 30000 habitants.
[1] Le classement ElectionScope des villes les mieux gérées d'Île-de-France L'Expansion.com - publié le 29/02/2008 à 17:42